La création d’entreprise en Espagne peut se réaliser sous de nombreux statuts : union temporaire d’entreprise dans l’industrie, société en nom collectif, groupement d’intérêt économique, entrepreneur individuel, etc. L’implantation d’entreprise française peut également faire l’objet de différentes situations : bureau de représentation, succursale, etc. Dans cet article, nous allons restreindre le périmètre aux seules créations de sociétés de droit espagnol, par une entreprise française. Cela vous aidera à choisir les meilleurs statuts juridiques en Espagne pour votre projet d’implantation.
Statuts juridiques en Espagne : le match SA / SL
Deux types de sociétés coexistent en droit espagnol :
- SA (Sociedad Anonima, capital minimum de 60 000 euros) ;
- SL (Sociedad Limitada, capital minimum de 3 000 euros).
Au moment de créer une filiale à 100 % en Espagne, la quasi-totalité des entreprises françaises optent pour la SL.
La standardisation est le mot d’ordre des statuts juridiques en Espagne
La loi sur les sociétés de capitaux impose à toute société des obligations semblables :
- disposer de statuts rédigés selon un certain ordre chronologique ;
- nommer des organes de gouvernance précis ;
- adopter un fonctionnement et une organisation conformes à la loi.
Autant dire que la souplesse et l’agilité que l’on connaît en France depuis le succès des SAS (société par actions simplifiée) sont absentes. En France, le private equity impose une gouvernance et des statuts personnalisés, encore largement absents en Espagne.
Les statuts de la société sont standardisés : on ne peut ajouter, ni ôter, certains articles. L’aménagement se fait à la marge. Tout passe par le notaire espagnol et laisse donc peu de place à la créativité juridique.
Une gouvernance rigide
Quels que soient les statuts juridiques en Espagne, la société est gouvernée par :
- un gérant unique ;
- deux gérants autonomes et solidaires ;
- deux gérants co-signataires ;
- un conseil d’administration (CA) comportant au minimum 3 personnes (Président, secrétaire et administrateur).
L’administrateur, en Espagne, dispose des pleins pouvoirs pour engager la société auprès des tiers et des administrations.
Un objet social déterminant
En général, l’entreprise se contente de traduire l’objet social de sa société française pour sa filiale espagnole. Les statuts juridiques en Espagne permettent cela, sauf en cas d’activité réglementée.
Cet objet social détermine l’activité principale de la société, qui donnera l’équivalent de son code APE (activité principale de l’entreprise). Or, ce code permet à l’organisme statistique espagnol de classer la société. Mais il offre surtout au fisc espagnol la possibilité de challenger les résultats déclarés avec les moyennes du secteur. Un écart trop important peut entraîner un contrôle fiscal…
Enfin, le code APE espagnol détermine quel accord de branche est applicable à la filiale espagnole. Cette décision aura un impact sur votre capacité à dupliquer votre politique RH en Espagne, les conditions à faire apparaître dans vos contrats de travail espagnols, etc.
Quelles sont les différences entre la SA et la SL?
La création des sociétés et leur organisation quotidienne sont identiques. Les seuils et les obligations comptables aussi. Alors, quelles sont les différences entre une SA et une SL ?
La société anonyme espagnole concerne principalement la défense des intérêts des associés minoritaires, dans le cadre d’une cotation en bourse notamment. Le recours à des auditeurs externes est donc plus fréquent. Tout changement de haut de bilan nécessite un rapport d’audit. En outre, la durée de vie d’un administrateur est fixée à 6 ans.
La société à responsabilité limitée espagnole n’a pas vocation à être cotée. Au contraire, c’est plutôt une société fermée avec droit de préférence accordé aux associés en cas de cession de parts. Les entreprises familiales ou les filiales détenues par un groupe opteront pour ces statuts juridiques en Espagne, qui concerne plus de 9 sociétés sur 10.
Quelles sont les différences entre les statuts juridiques en Espagne et en France ?
En général, deux points étonnent nos clients en Espagne : le seuil d’audit et l’importance de la délégation de pouvoirs.
Un seuil d’audit élevé
Le recours à un commissaire aux comptes (CAC) s’impose lorsque deux des trois critères suivants sont remplis pendant deux années consécutives :
- un total de bilan supérieur à 2 850 000 euros ;
- un chiffre d’affaires supérieur à 5 700 000 euros ;
- un effectif supérieur à 50 salariés.
En pratique, les recours aux CAC sont donc assez rares auprès des PME espagnoles. Ajoutons que l’expertise comptable en Espagne n’est pas une profession réglementée et est donc plus ouverte qu’en France.
Une société française peut toujours solliciter un contrôle ou un audit sur sa propre initiative.
Des délégations de pouvoir indispensables
Toute décision passe par un acte notarié en Espagne (changement de siège social ou augmentation de capital par exemple). L’anticipation est donc la règle.
Le gérant de la filiale espagnole est très souvent le représentant légal de la maison mère française pour des questions de responsabilité civile, pénale, fiscale, etc. Il est donc essentiel de mettre en place des délégations de pouvoir pour fonctionner correctement.
Celui qui peut engager la société espagnole, quel que soit les statuts juridiques en Espagne, fait l’objet d’un enregistrement dans un acte notarié. La banque, le partenaire commercial, le client, chacun vérifie ainsi qu’il signe avec le bon interlocuteur.
Or, les changements de direction s’accélèrent en France, entre mobilité et rachat. Très souvent, le président français a déjà quitté l’entreprise lorsque l’on pense à la filiale espagnole, alors que sa signature est encore requise pour adopter toute modification et délégation de pouvoir !
Une nouvelle personne doit obtenir une délégation de pouvoir notariée (1 ou 2 mois de délai) mais aussi un NIE (2 ou 3 mois de délai). Résultat : personne ne peut faire fonctionner le compte bancaire pendant cette période, ni licencier. Un compte bancaire bloqué pendant 5 mois est complexe à gérer pour l’entreprise !
Pour conclure, le choix des statuts juridiques ne pose pas de problème, mais cela ne veut pas dire que tout est simple en Espagne ! Votre choix se portera certainement sur la SL pour créer une filiale et s’implanter sur le marché espagnol. Nous recommandons surtout de déléguer le pouvoir de signature à 2 ou 3 autres personnes en France ou en Espagne. C’est la seule solution pour rester opérationnel à tout moment.
Notes : Le présent article concerne des informations d’ordre général, qui ne constituent pas un conseil. Nous vous invitons à nous consulter pour de plus amples précisions.